Daily-Bul - Les Revues

Jean-Pierre Verheggen : - Le Daily-Bul, la revue la plus désinvolte du monde ?

André Balthazar : - Cette désinvolture, si on y prend garde, apparaît dans la présence quelque peu antinomique du mot "Moniteur", dont nous avons affublé notre revue. Et, pour aller plus loin dans l'analyse, dans le titre même que nous avions choisi : le Daily-Bul.

Un moniteur (Journal officiel pour les bilingues) informe, conseille, guide. Imperturbables, avec une pointe d'innocente ironie, nous aurions dû assumer des responsabilités que nous n'avions pas l'intention de prendre. Sans conteste, le mot haussait notre noeud papillon et conférait à la Pensée Bul et à l'Académie de Montbliart qui l'abritait un indiscutable standing. Notre désinvolture n'était pas à un croche-pied près.

Jean-Pierre Verheggen : - Idem pour Daily-Bul ? 

André Balthazar : - Nous savions très bien que notre quotidienneté serait très aléatoire et épisodique (quatorze numéros parus en quarante ans), mais le mot "daily" tout embrumé d'anglicisme et de haut prestige répondait à nos ambitions. La désinvolture peut aussi venir d'ailleurs, mais de façon moins préméditée et un peu bête.

Parce que le premier texte du Daily-Bul n°1, espèce de fronton sur nos monument à venir, s'intitulait Ne pas, nous fûme aussitôt apparentés aux dadaïstes gourmands de négations. L'histoire, notre histoire (avec un petit h) était tout autre cependant. Ayant écrit ce texte de façade et l'ayant relu, Pol et moi avions trouvé que, même si les mots ne voulaient pas dire grand chose, le ton en était un peu trop sentencieux. Nous avons donc décidé, sans trop nous fatiguer, de le transcrire à la forme négative sous le titre Ne pas. Cela avait une autre allure, pas plus claire mais plus autoritaire, sous une forme d'absence qui n'en disait pas plus. Pirouette en forme d'interdit. Et on nous offrit une casquette qui n'était pas la nôtre.

Le Daily-Bul : quarante balais et quelques. Entretien :André Balthazar - Jean-Pierre Verheggen, La Louvière, Le Daily-Bul, 1998.