Le bleu et la poussière
Titre
Le bleu et la poussière
Créateur
Éditeur
Date
1998
Description
Dédicace de Marcel Piqueray à Luc Rémy
Format
13 X 20 cm
Langue
fr
Type
Support
179 p.
Identifiant
FLRB-IZO-B-0 000 134
Résumé
Un nouvel âge d'or
Depuis 1994, Le bleu et la poussière est le septième recueil d'Izoard à paraître, mettant un terme provisoire ou irrévocable à une période faste, marquée entre autres par l'étonnant Sulphur (Editions Odradek, 1994 — tiens ! Revue Odradek « extraordinairement mobile et qui ne se laisse pas attraper », n° 6, un poème inédit et un dessin d'Allen Ginsberg, référence adéquate au travail qui nous intéresse : à la fois proche dans l'esprit tout en demeurant très éloignée dans la forme) et par Rue Sous-l'eau (Tétras Lyre, 1997). Ainsi donc se poursuit le voyage hébété entrepris par Izoard il y a longtemps maintenant. Et nous voici offerte une nouvelle chance de lui emboîter le pas sur la trajectoire du dedans, de dépouillements en dépouillements, avec comme unique bagage son manteau de pauvreté cousu aux mots essentiels, pour finalement parvenir ici, à l'endroit qui nous occupe, près d'une apogée.
D'emblée la question se pose : comment parler d'un ensemble de poèmes aussi dense et aéré, complexe et limpide, sans avoir recours à la citation, à la paraphrase ou à l'analyse pédante ? Sans risquer de courir à l'échec ? Parce qu'il restera toujours un vide à combler. Il n'y a pas de réponse à cette question. Juste des tentatives avortées de résolution. Tout, et rien en fait, a déjà été dit au sujet d'Izoard. Pourquoi dès lors ne pas aller vers le rien pour toucher à la totalité ?
Il suffirait peut-être de décrire l'objet au scalpel. Un livre. A la couverture rugueuse d'un bleu ciel que le temps délavera. Prénom et nom de l'auteur en caractères noirs, soulignés. Titre en majuscules lie-de-vin. Collection. Editeur. Rabats... Autant de poèmes répartis sur autant de pages à raison de deux par page... Mais ce système ne peut fonctionner. Car cet objet n'est pas un livre. Il est une demeure.
Décrire alors la demeure ? Elle est vaste, ancienne et mystérieuse, apparemment vide. Elle germe autour du silence, plombée sur les flancs d'une colline. Lorsque vous ouvrez le livre à la première page, vous pénétrez à l'intérieur de la demeure. Echo stable mais ténu, une voix vous guide. Et plus vous avancez, plus les repères viennent à vous manquer, malgré la répartition linéaire des pièces, en enfilade. Jusqu'au moment où vous prenez conscience qu'un univers entier se déplie derrière ces murs. Les jours s'ajoutent, infusent, vous progressez avec lenteur et vous vous êtes égaré. Pourtant la voix n'a jamais cessé de vous mener : interrogations sur la substance du poème, sur l'acte charnel d'écriture ; sensations d'extases et d'implosions de corps aux limites physiques rendues délibérément floues, chargées d'empathie. Le plancher craque, et toujours vous revenez au grenier où une enfance, mélancolique, lucide, acérée, vous attend, de la même manière que l'on frôlerait un jour tout ce que l'on a perdu. Images indélébiles, bleues comme ces ciels trop rapides de l'autre côté de fenêtres aux pigments de lichen, poussiéreuses comme ces pavés de lumière impossibles à franchir. Parce que pas à pas, peu à peu, de mieux en mieux, c'est vers l'enfance absolue qu'Izoard vous mène. Le temps venu, vous regrettez de quitter la demeure. Vous devinez confusément que vous y reviendrez afin de chercher encore, de puiser, et par hasard, qui sait, de trouver. Chaque mot parcouru a été rongé jusqu'à la moelle. Une fois lu, une fois mâché, par grâce magique, vous en êtes imprégné, vous en êtes débarrassé.
Bien entendu, cela ne suffit pas. Chacun, en fin de compte, aura sa façon propre de décrire Le bleu et la poussière, ainsi qu'il devrait en être de toutes les poésies. Izoard trame et cisèle le décor, sans gâcher de plâtre ce qui tient droit, nous laissant libres de l'interprétation.
Il suffirait certainement de pousser la porte, de lentement compter les marches, d'ouvrir le livre, pour rejoindre Jacques Izoard en son nouvel âge d'or.
Serge Delaive
Depuis 1994, Le bleu et la poussière est le septième recueil d'Izoard à paraître, mettant un terme provisoire ou irrévocable à une période faste, marquée entre autres par l'étonnant Sulphur (Editions Odradek, 1994 — tiens ! Revue Odradek « extraordinairement mobile et qui ne se laisse pas attraper », n° 6, un poème inédit et un dessin d'Allen Ginsberg, référence adéquate au travail qui nous intéresse : à la fois proche dans l'esprit tout en demeurant très éloignée dans la forme) et par Rue Sous-l'eau (Tétras Lyre, 1997). Ainsi donc se poursuit le voyage hébété entrepris par Izoard il y a longtemps maintenant. Et nous voici offerte une nouvelle chance de lui emboîter le pas sur la trajectoire du dedans, de dépouillements en dépouillements, avec comme unique bagage son manteau de pauvreté cousu aux mots essentiels, pour finalement parvenir ici, à l'endroit qui nous occupe, près d'une apogée.
D'emblée la question se pose : comment parler d'un ensemble de poèmes aussi dense et aéré, complexe et limpide, sans avoir recours à la citation, à la paraphrase ou à l'analyse pédante ? Sans risquer de courir à l'échec ? Parce qu'il restera toujours un vide à combler. Il n'y a pas de réponse à cette question. Juste des tentatives avortées de résolution. Tout, et rien en fait, a déjà été dit au sujet d'Izoard. Pourquoi dès lors ne pas aller vers le rien pour toucher à la totalité ?
Il suffirait peut-être de décrire l'objet au scalpel. Un livre. A la couverture rugueuse d'un bleu ciel que le temps délavera. Prénom et nom de l'auteur en caractères noirs, soulignés. Titre en majuscules lie-de-vin. Collection. Editeur. Rabats... Autant de poèmes répartis sur autant de pages à raison de deux par page... Mais ce système ne peut fonctionner. Car cet objet n'est pas un livre. Il est une demeure.
Décrire alors la demeure ? Elle est vaste, ancienne et mystérieuse, apparemment vide. Elle germe autour du silence, plombée sur les flancs d'une colline. Lorsque vous ouvrez le livre à la première page, vous pénétrez à l'intérieur de la demeure. Echo stable mais ténu, une voix vous guide. Et plus vous avancez, plus les repères viennent à vous manquer, malgré la répartition linéaire des pièces, en enfilade. Jusqu'au moment où vous prenez conscience qu'un univers entier se déplie derrière ces murs. Les jours s'ajoutent, infusent, vous progressez avec lenteur et vous vous êtes égaré. Pourtant la voix n'a jamais cessé de vous mener : interrogations sur la substance du poème, sur l'acte charnel d'écriture ; sensations d'extases et d'implosions de corps aux limites physiques rendues délibérément floues, chargées d'empathie. Le plancher craque, et toujours vous revenez au grenier où une enfance, mélancolique, lucide, acérée, vous attend, de la même manière que l'on frôlerait un jour tout ce que l'on a perdu. Images indélébiles, bleues comme ces ciels trop rapides de l'autre côté de fenêtres aux pigments de lichen, poussiéreuses comme ces pavés de lumière impossibles à franchir. Parce que pas à pas, peu à peu, de mieux en mieux, c'est vers l'enfance absolue qu'Izoard vous mène. Le temps venu, vous regrettez de quitter la demeure. Vous devinez confusément que vous y reviendrez afin de chercher encore, de puiser, et par hasard, qui sait, de trouver. Chaque mot parcouru a été rongé jusqu'à la moelle. Une fois lu, une fois mâché, par grâce magique, vous en êtes imprégné, vous en êtes débarrassé.
Bien entendu, cela ne suffit pas. Chacun, en fin de compte, aura sa façon propre de décrire Le bleu et la poussière, ainsi qu'il devrait en être de toutes les poésies. Izoard trame et cisèle le décor, sans gâcher de plâtre ce qui tient droit, nous laissant libres de l'interprétation.
Il suffirait certainement de pousser la porte, de lentement compter les marches, d'ouvrir le livre, pour rejoindre Jacques Izoard en son nouvel âge d'or.
Serge Delaive
ISBN
2-7291-1225-1
Collection de l'éditeur
N° dans la collection
N°11
Dépôt légal
Août 1998
Collection
Citer ce document
Izoard, Jacques, “Le bleu et la poussière,” Centre Daily-Bul & C° - Archives, consulté le 22 novembre 2024, http://dailybul.be/archibul/items/show/2924.